La problématique de la saturation des cimetières municipaux de la Ville de Pikine


La pratique funéraire revêt une dimension éminemment culturelle et cultuelle et varie selon les coutumes et les us des peuples. Le déterminisme religieux en joue un rôle important.
Si une pour une bonne partie de l’humanité, la mise sous terre des êtres disparus est la règle, la crémation ou l’immersion sous les eaux (mer ou fleuve) reste une pratique courante pour certains autres. Des peuples, forestiers notamment, ont vocation à encastrer leurs morts dans des troncs d’arbres.
Les sénégalais, monothéistes dans leur quasi majorité, enterrent leurs défunts dans des espaces communautaires dédiés (les cimetières) bien qu’il existe des rares cas où des figures emblématiques de la vie publique (guides et chefs religieux, autorités politiques, notabilités coutumières etc.) sont mis sous terre dans des endroits spécifiques (lieux de culte, d’habitation ou autres).
Le rétrécissement des réserves foncières dans des zones à forte concentration humaine rend problématique la disponibilité d’espaces devant permettre l’extension des cimetières déjà existants ou la création de nouveaux.
La ville de Dakar fut déjà confrontée à cette question au milieu du siècle dernier consécutivement au boom démographique provenant de la création et de l’extension de nouveaux quartiers périphériques ceinturant le plateau où étaient concentrés l’administration, les services, les hôpitaux et les commerces.
Les cimetières musulmans situés à l’emplacement actuel de la Grande Mosquée de Dakar furent transférés à Soumbedioune dans un site contigu aux anciens abattoirs de Dakar. Ces cimetières furent fermés vers la fin des années 1970 et transférés à Yoff.
Les cimetières catholiques de Bel Air furent fermés dans les années 1 990 avec l’aménagement des cimetières Saint Lazare de Béthanie situés sur un lieu adossé à l’Aéroport Sédar Senghor et donnant sur la Voie de Dégagement Nord.
Pour le cas spécifique de l’agglomération urbaine de Pikine-Guédiawaye, considérée dans sa configuration territoriale actuelle, son peuplement remonte à partir de l’année 1952. Aspirant à une urbanité moderne, la ville de Dakar ne pouvait pas s’accommoder de certains quartiers populeux non lotis. Dès lors des quartiers ont été déguerpis et réinstallés à PIKINE accentuant ainsi son peuplement qui s’est davantage développé avec un exode rural sans précédent consécutif aux sécheresses des années 70.
Les cimetières municipaux musulmans situés dans la Commune de Pikine Ouest et en face de la Commune de Pikine Nord étaient le principal lieu d’enterrement bien qu’il en existait d’autres situés dans des villages traditionnels de Thiaroye Sur Mer, Thiaroye Gare, Yeumbeul, Boune, Malika, Mbao et KeurMassar et des quartiers comme Diameguène et Sam Sam.
Ces cimetières ont atteint, dans leur quasi-totalité leurs limites objectives en termes d’absorption de nouveaux enterrements, eu égards à l’indisponibilité de réserves foncières et à l’accroissement démographique exponentiel observé dans la localité.
Les citoyens pikinois de confession chrétienne se rabattent pour la mise sous terre de leurs défunts proches aux cimetières Saint Lazare de Béthanie malgré les contraintes liées à l’éloignement de la plupart des zones d’habitation et de la mobilité urbaine.
Des plaidoyers ont été portés depuis plus de deux décennies par des organisations civiles faîtières de la ville dont celles des imams, des délégués de quartier, le clergé et certains mouvements associatifs allant dans le sens de l’extension des cimetières principaux et/ou l’aménagement de nouveaux pour les différentes confessions religieuses.
La première alternative s’étant heurtée à l’inélasticité du foncier, une seconde a été envisagée et consistant à faire déclasser 10 hectares de la forêt de Mbao pour y faire aménager des cimetières à côté de ceux des naufragés du bateau le Diola (8 ha réservés à la population de confession musulmane et 2 ha à celle de confession chrétienne. Cette dernière alternative s’est heurtée à des considérations d’ordre écologique.
Avec la cadence accélérée des enterrements dus aux effets de la COVID 19, un niveau de saturation extrême a été atteint poussant même la population locale à faire de l’extension des cimetières une demande forte et pressante référée au Chef de l’Etat par le Maire de la Ville de Pikine.
Après avoir pris la pleine mesure de cette doléance, le Président de la République, Son Excellence Macky SALL a pris le décret 2021-1067 de la 11/08/2021 portant extension d’un peu plus de quatre (04) hectares des cimetières musulmans de Pikine.
Par ce geste, le Chef de l’Etat prouve qu’il est à l’écoute de son peuple et fait siennes de ses préoccupations essentielles.

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